Education Analytics : comment la BI peut transformer l’expérience éducative ?
Loin du modèle transactionnel classique inhérent au processus éducatif tel qu’on le connaît, les technologies de l’éducation renforcées par le pouvoir de l’analytique ouvrent la voie aux nouveaux modes d’apprentissage interac威而鋼 tifs et personnalisés qui présentent à la fois des atouts et des limites.
Nul ne doute que L’Edtech, un marché en pleine croissance, n’aurait pas pu évoluer à ce rythme croissant sans les apports incontestables des sciences des données, de l’IA et de la Business Intelligence. L’informatique décisionnelle ou la BI s’impose comme étant un outil puissant dont les potentialités d’exploitation semblent illimitées dans le secteur de l’éducation. En offrant des solutions diverses pour améliorer la qualité de l’enseignement et faciliter la prise de décisions éclairée, la data-driven instruction ou l’enseignement basé sur les données remet en question la standardisation typiquement associée aux systèmes éducatifs archaïques.
En effet, les applications du BI dans l’éducation sont nombreuses et variées. De l’analyse des données des étudiants, tels que les résultats scolaires et le taux d’absentéisme, au learning activity analysis et l’évaluation de l’interactivité, la rétention, et la motivation à l’égard des programmes scolaires, l’analytique est au cœur de la personnalisation des contenus éducatifs en fonction du style d’apprentissage de chaque apprenant. Des interventions plus précoces pour les étudiants en difficulté seraient théoriquement envisageables avec l’analyse rapide et le traitement continu des données dont l’accessibilité serait plus facile avec la Data viz et les tableaux de bord interactifs.
Selon Boston University, le Predictive Learning Analytics précède désormais toutes les interventions réformatrices et le passage à l’action en faveur de la réussite de l’expérience éducative dans le monde académique.
Sur le plan technique, la mise en place d’un projet BI, étant un processus structuré, passe généralement par plusieurs étapes. Il est d’abord essentiel de collecter les données pertinentes en utilisant un processus ETL pour extraire, transporter et charger les données de différentes sources disponibles. Ensuite, les données doivent être stockées et modélisées dans un datawarehouse. La troisième étape consiste à restituer et distribuer les données, en créant des datamarts pour répondre aux besoins spécifiques des différents utilisateurs. Cette phase inclut la création de rapports, de statistiques, de tableaux de bord, ainsi que l’utilisation d’outils de navigation dans les cubes OLAP. Enfin, la phase d’analyse et d’exploitation permet aux utilisateurs finaux d’analyser les données pour en tirer des conclusions. Cette étape peut inclure des analyses multidimensionnelles, du datamining pour explorer d’éventuelles corrélations et des analyses de performance.
Replacée dans le contexte éducatif, la BI collecte des données à partir de différentes sources, tels que les systèmes de gestion de l’apprentissage, les applications éducatives, et les plateformes. Ensuite, ces données sont analysées et visualisées à l’aide d’outils de BI tel que Power BI pour en dégager les tendances ou les patterns.
Cependant, il existe des enjeux à prendre en compte dans l’adoption des technologies de l’informatique décisionnelle dans le secteur de l’éducation. La sécurité des données des étudiants dont la divulgation peut entraîner des conséquences graves présente un problème de taille. Il est donc important de mettre en place des mesures de sécurité appropriées pour protéger ces données.
D’autre part, il convient de noter que les entreprises d’éducation digitale et les plateformes d’apprentissage numérique ont été largement critiquées pour redéfinir et réadapter le concept d’apprentissage à l’architecture de leurs systèmes afin de mieux correspondre à la rhétorique néolibérale et au récit de la révolution de la technologie éducative et de la démocratisation du savoir à travers le digital. Là où se cache parfois une dévalorisation du savoir lui-même autant qu’il serait réduit à une forme de bombardement informationnel vidé du sens et déraciné d’un milieu collaboratif de l’apprentissage par la pratique ou le learning by doing. Pire encore, certaines plateformes ont fait recours aux techniques issues de la psychologie béhavioriste pour modéliser le comportement des étudiants au profit d’une plus longue rétention sur les sites. Cela soulève bien évidemment des questions éthiques majeures. Il est ainsi justifiable de prendre le recul critique nécessaire par rapport à l’impact de la datafication et de la surveillance amplifiée, certes, par la puissance des systèmes d’aides à la décision DSS à l’ère du capitalisme des plateformes.
De plus, les avancées technologiques en matière de données ont des implications philosophiques et psychosociales profondes pour l’éducation, allant jusqu’à remettre en question les notions d’autonomie des apprenants. D’autres critiques plus radicales rejettent intégralement cette notion de « simplification » au cœur des modèles éducatifs orientés à la consommation, où le contenu est toujours disponible sans aucune contrainte freinant la recherche plus active de l’information qui ne serait vraiment retenue et comprise selon les sciences cognitives qu’après avoir fourni un effort cognitif consistant à l’apprendre.
Par conséquent, l’éducation digitalisée et révolutionnée par le big data et l’analytique doit s’inscrire dans un projet sociétal gardant les principes de base d’une éducation humaniste valorisant la créativité et respectant les limites de l’humain, et les notions d’erreur et d’illusion tant défendues par le philosophe de la complexité Edgar Morin. Capitaliser sur les apports de la BI de manière responsable et éthique doit s’aligner avec un nouveau paradigme éducatif tenant compte des enjeux du digital pour repenser l’expérience de l’apprentissage dans son ensemble.
Écrit par : YOUSSEF ZAATOUR